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| Spahi Roger MARION (3/3/1er RMSM) | |
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Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 13 septembre 1944 Sam 13 Sep - 14:45 | |
| Mercredi 13 septembre 1944
MANDRES-SUR-VAIR À 11h00, le peloton reçoit l'ordre d'attaquer REMONCOURT. Traversée sans histoire de PAREY-SOUS-MONFORT. À DOMJULIEN, l'accueil de la population est formidable. Il n'y a pas d'Allemands. Mais les gens nous informent que les F.F.I. nous attendent à l'entrée de REMONCOURT.
Descente à toute vitesse par la petite route qui traverse une partie boisée. Et voici les premières maisons de REMONCOURT. Pas de F.F.I. Par contre, sur notre droite, avant le mur de la première maison, un amas de feuillage un peu fané dans lequel apparaît la sortie d'un canon. Je crie: "Antichar à droite!" René et P'tit Louis l'ont vu en même temps: "Fonce dessus, on s'en occupe." J'accélère, tout en faisant fonctionner la sirène (souvenir des avions italiens qui nous mitraillaient lors de la débâcle en juin 1940 à ARC-LES-GRAY, c'est démoralisant!) J'arrive à la hauteur du canon et le double même quelque peu. P'tit Louis ne perd pas de temps pour tourner la tourelle et prendre le canon dans le collimateur. Son premier obus fait mouche. Le canon est muselé. C'est un 50. Les servants sont en piteux état. Ils n'ont plus qu'à se rendre. Nous constatons que la lunette est intacte, un obus était engagé, et le canon était bien dans l'axe de notre route! Pourquoi ne nous ont-ils pas tiré dessus? Ont-ils perdu quelque temps à essayer de lire "Simone" que j'avais peint en grosses lettres sur le bouclier du 37? La sirène et notre vitesse les ont-ils affolés? Peu importe. Nous l'avons échappé belle.
René appelle le chef de peloton pour lui rendre compte. Pas de réponse. Le reste de la patrouille arrive. Chaque poste essaye d'appeler Bernard. Toujours pas de réponse. Les 6 postes du peloton communiquent entre eux: rien de la part du Lieutenant. Que s'est-il passé? Où est son A.M. que personne n'a vue depuis DOMJULIEN?
Nous continuons à exploiter la situation. Si les F.F.I. brillent par leur absence, les Allemands semblent vouloir nous empêcher de les déloger.
Comme toujours, René et Guy descendent de l'A.M. pour faire la patrouille à pied. Jacques DEMARLE se joint à eux. Il es sur ma gauche, à quelques mètres devant l'A.M. Du bras droit, il tient sa mitraillette ou sa carabine; sous son bras gauche, il serre précieusement un petit chien, souvenir d'une jeune parisienne. Pittoresque, mais peu pratique. Jacques vient vers moi et me confie sa bestiole que je place sur mes genoux. La patrouille avance lentement. À chaque coup de canon ou de mitrailleuse envoyé par P'tit Louis, j'ai droit à une rasade d'"eau chaude". Excédé, je balance le roquet par-dessus bord… juste au moment où Jacques se retourne dans ma direction. Ce qui me vaut son plus beau vocabulaie: "Espèce d'en…" Et il vient récupérer son chien, lequel disparaîtra le soir même. Nous le retrouverons à STRASBOURG chez les fusiliers-marins, malheureusement Jacques trouvera la mort dans un accident le 30 septembre.
À gauche, à part la première maison, les autres sont un peu en retrait. Il y a un tas de fagots sur ce large "trottoir". De derrière ce tas de fagots surgit un lieutenant allemand qui nous envoie une grenade à manche. P'tit Louis le calme à coups de 37. L'un des perforants entrera dans la maison où nous serons invités le soir!
Nous transportons le lieutenant près du 50, avec ses compatriotes. Bernard est arrivé… à pied! Dans l'un des tournants après la sortie de DOMJULIEN, FOUCHER de BRANDOIS, son conducteur, avait suivi tout droit dans la forêt et l'A.M. s'était retournée sur elle-même. Coup de chance: pas un blessé.
Bernard prend vite la situation en main. Il prépare un ultimatum et charge deux jeunes prisonniers d'aller le remettre à leur chef: "Vous êtes encerclés. Rendez-vous plutôt que de faire couler inutilement du sang. Signé: Général de la MOTTE". Je laisse à Bernard le soin de rappeler les termes exacts… s'il s'en souvient.
Les deux jeunes partent… et ne reviendront pas. Nous les retrouverons plus tard, dans le gros paquet de prisonniers. L'ultimatum reste donc sans réponse. Nous reprenons la progression.
Je me retrouve à la hauteur de la première maison à gauche. Le propriétaire se hasarde dans sa porte entrebaillée. Je lui demande s'il y a beaucoup d'Allemands dans le pays. Je n'ai pas le temps d'attendre sa réponse, car, de l'autre côté de la route, à 10 ou 20 mètres, je vois un Allemand braquer sur nous sa Panzerfaust. J'ai juste le temps de repartir en marche arrière. La Panzerfaust nous passe devant le nez et va s'écraser dans la maison où le brave homme a eu le réflexe de rentrer. Une volée de je ne sais quoi m'arrive dans la figure. Je recule encore de quelques mètres. Bernard arrive: "Tu es blessé? — Non, je ne crois pas." En passant la main, il y a quelques petits gravats, très peu de taches de sang, et quelques minuscules morceaux de ferrailles. (Sept ans plus tard, le docteur BAUMLER, du NOIRMONT (Jura Bernois) m'en retirera encore un, qui avait produit une légère inflammation au-dessus de l'œil droit). Il y a encore des petites déchirures sur mon sac marin qui était accroché à la tourelle et que j'ai donné à la salle d'Honneur du 1er Régiment de Spahis à SPIRE en mars 1975, avec la lunette du canon de 50 que j'avais récupérée ce même jour, et d'autres souvenirs.
Nos paquetages en ont pris un coup. Il me reste en souvenir le livre "Charles de GAULLE" de Philippe BARRES, que j'avais acheté à HORNSEA le 13 juin 1944 et dont les 256 pages sont traversées par un éclat de cette panzerfaust. Quant au lanceur de Panzerfaust, P'tit Louis l'a mis dans l'incapacité de recommencer.
Les Allemands sont coriaces. Nous avançons maison par maison. Peu avant de rejoindre la route qui vient de VITTEL et par laquelle arrivent des éléments du 501 et d'autres du G.T.V., René marche devant l'A.M., son colt à la main. Brusquement, le colt lui saute de la main, tournoie en l'air pour se retrouver plusieurs mètres plus loin sur sa droite. Un allemand visait René. La balle avait arraché l'œilleton de son colt. Peu après, des voix, presque des cris se font entendre derrière les volets d'une maison de droite. René frappe à ces volets. Quel n'est pas notre étonnement de voir apparaître de la gent féminine… ce couleur noire, dans ce bled vosgien!
Enfin, la jonction se fait avec les chars du 501. Il nous a fallu près de trois heures pour remplir notre mission. Dans son journal de marche, le Capitaine LUCIEN fait état de 15 Allemands tués par le 3ème peloton.
La journée n'est pas terminée. Il s'agit maintenant de récupérer l'A.M. de Bernard. Nous reprenons à quelques-uns la direction de DOMJULIEN. Dans un tournant, un calot rouge derrière une mitrailleuse. C'est Jo RENUCCI, le tireur de Bernard qui a réussi à extirper son arme pour l'utiliser si besoin en était.
L'obusier de FERYN se place au bord de la route à l'endroit où FOUCHER l'avait quittée. Mise en place des câbles. Et l'obusier remet sur ses roues l'A.M. qui était complètement retournée. C'est inimaginable tout ce qu'une A.M. peut contenir! Toute une partie se retrouve entre les arbres, avec l'huile et l'essence, obéissant aux lois de la pesanteur.
L'A.M. a bon caractère: niveau du moteur rétabli, quelques jerrycans d'essence et le moteur repart. Passant par là l'année après la guerre, j'ai retrouvé quelques morceaux du filet de camouflage et d'autres bricoles dispersées dans la végétation.
Au moment de repartir sur REMONCOURT, l'un de nous propose un tour à DOMJULIEN: "Dis donc, les gens nous ont bien accueillis tout à l'heure. Et ton collègue, le curé, avait l'air bien sympathique. On y va?". Et nous voici à DOMJULIEN. Pendant que nous racontons la libération de REMONCOURT, un vin généreux arrose les tartes à mirabelles préparées depuis notre passage en début d'après-midi. Le curé et ses ouailles sont vraiment sympathiques. Nous repartons bien restaurés et les A.M. bien garnies de ce qu'il faut pour faire descendre tartes et gâteaux.
À REMONCOURT, les F.F.I. défilent, fiers de cette libération où ils avaient brillé par leur absence. Nous mettons fin rapidement à cette plaisanterie de mauvais goût.
Le soir, la famille qui nous invite s'en vient à déplorer qu'avant leur départ les Allemands ont trouvé le moyen d'envoyer un obus dans leur maison, obus qui a traversé la porte d'entrée, de biais, la porte de la cuisine, pour terminer sa course dans la batterie de cuisine accrochée au mur. Les débris sont encore là, et nous y trouvons un 37, un de ceux que P'tit Louis avait envoyés sur le "lieutenant à la grenade". Il nous semble préférable de ne pas donner de précisions et de laisser croire…
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 14 septembre 1944 Dim 14 Sep - 10:25 | |
| Jeudi 14 septembre 1944
Dans la matinée, nous partons en direction de MATTAINCOURT pour revenir à REMONCOURT. La direction de la "Simone" laisse à désirer. Elle se ressent probablement du 88 de LA CROIX DE BERNY. L'après-midi, alors que le peloton se dirige sur VELOTE, je suis envoyé à VITTEL pour faire réparer l'A.M. à l'E.R. 1.
Je rejoindrai le peloton à JORXEY, le dimanche 17 septembre, en début d'après-midi. Ainsi, j'ai raté l'épopée de CHÂTEL-SUR-MOSELLE, où le peloton s'est magnifiquement distingué et qui a valu à Pierre REVERCHON de se retrouver au Val de Grâce pour de longs mois.
Pendant que les mécanos remettent la "Simone" en état, je file à CONTREXÉVILLE chez des amis de ma famille, le boulanger DESSEZ. Avec la moto du papa Gabriel, j'essaye, en vain, de retrouver nos blessés et disparus de SAINT-REMIMONT: Georges BOUVIER, Pierre MERCINIER, Jean SERVOT et Jacques BEINISCH. Mais il y a tellement d'antennes chirurgicales et d'hôpitaux. Et je n'ai aucun renseignement. Pierre MERCINIER nous rejoindra en mai 1945. J'ai retrouvé Georges BOUVIER en novembre 1979 et Jean SERVOT en novembre 1984. Jacques BEINISCH reste introuvable. Pierre BELLEMARE pourrait s'en occuper…
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: Re: Spahi Roger MARION (3/3/1er RMSM) Lun 15 Sep - 16:50 | |
| [Vendredi 15 septembre 1944]
Le 15 septembre, à CONTREXÉVILLE, je rencontre le Père HOUCHET. Ce sera la dernière fois. J'ai relaté ce qu'il m'avait appris sur la journée du 26 août.
NDLR: Le Père Houchet sera tué à la libération de Strasbourg le 23 novembre 1944.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 19-22 septembre 1944 Mer 24 Sep - 17:07 | |
| Lundi 18 septembre 1944
L'après-midi, nous quittons JORXEY. Par une route en piteux état, nous arrivons à NOMEXY. Une patrouille à FRIZON, où nous ne voyons aucun "frizou". Le soir, nous campons dans une petite usine à l'entrée de NOMEXY.
Mardi 19 septembre 1944
Depuis le matin, l'artillerie allemande bombarde le pont rétabli par le Génie sur la Moselle. De garde de 6h00 à 7h30, celà ne me réveille pas. Nous apprendrons que le Génie subira de grosses pertes. On attend. NANCY n'est qu'à une cinquantaine de kilomètres… Vers 15 heures, nous franchissons la Moselle par le gué. Le peloton est rattaché au sous-groupement PUTZ. Nous traversons CHÂTEL-SUR-MOSELLE, REHAINCOURT pour nous arrêter à HAILLAINVILLE. Bernard de la MOTTE arrive, s'appuie sur le blindage, près de la sirène et je l'entends encore nous annoncer que son jeune frère Jacques (5ème escadron) vient d'être blessé mortellement à MORIVILLE. Le soir, la "Simone" est à la sortie d'HALLAINVILLE, en direction d'ESSEY-LA-COTE: 4 kilomètres, mais déjà en Meurthe-et-Moselle. Ce village me rappelle deux amies d'enfance que je pourrai retrouver demain. Pour terminer la journée, Jiji (DUFOSSÉ, alias JANICOT) vient d'arroser les 17 ans qu'il a eus hier. Pour calmer ses velleités de jouer au cow-boy avec son revolver, je le "rachève" à la mirabelle et je le couche sur la plage arrière de l'A.M. Au petit matin, la pluie le remettra en forme.
Vendredi 22 septembre 1944
Le peloton quitte HAILLAINVILLE pour HADIGNY-LES-VERRIERES où tout l'escadron est groupé. Nous commençons à nous mettre en route au moment où le G.T.L. traverse HAILLAINVILLE. Notre "lance-patates" bloque le convoi, ce qui vaut un dialogue émaillé entre notre bricart-chef FERYN et le colonel de LANGLADE qui, au carrefour tout proche, surveillait la bonne marche de ses blindés.
Le séjour à HADIGNY (les "VITRIÈRES" version PAVIA) dure jusqu'à la fin du mois. Chaque soir, nous posons des mines à la sortie, en direction de BADMÉNIL-AUX-BOIS. Un certain lundi, Raphaël apprend, à ses dépens, le fonctionnement d'une Panzerfaust qu'il venait de récupérer.
Des habitants nous offrent l'hospitalité. Nous retrouvons la joie de dormir dans un lit. Jean BEYLER loge au presbytère. Monsieur le Curé est prisonnier. Sa mère est restée.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: Re: Spahi Roger MARION (3/3/1er RMSM) Jeu 25 Sep - 21:13 | |
| [Lundi 25 septembre 1944]
Me voici invité le lundi 25, en tant que séminariste. À la fin du repas, Madame KELLER nous montre la photo de son fils parmi les prisonniers d'une chambre de l'Oflag X B. Le monde est vraiment petit: Jean y retrouve son père, commandant d'active et responsable de la chambre. Et j'y reconnais deux amis séminaristes de NANCY, les lieutenants Émile CHONE et Charles HOUIN. Après la guerre, l'abbé François KELLER, (actuellement à LA BRESSE), assistera à l'ordination de ses deux lieutenants à NANCY et il recevra chez lui les parents de Jean BEYLER (qui sera tué le 10 novembre à BROUVILLE).
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 28 septembre 1944 Dim 28 Sep - 6:55 | |
| [Jeudi 28 septembre 1944]
À part les gardes et l'entretien de l'A.M., peu d'occupations. Les Allemands sont proches. Mais nous n'avons pas mission d'attaquer. Pourquoi ne pas profiter de cette accalmie pour pousser une petite "reconnaissance" personnelle vers NANCY. J'avais toujours dit à René que j'arriverais à NANCY avant qu'il n'aille à BREST. Aujourd'hui, jeudi 28 septembre, il me dit: "À ta place, il y a longtemps depuis que nous sommes en Lorraine, j'y serais allé. On s'arrangera pour les tours de garde."
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 29 septembre 1944 Lun 29 Sep - 18:32 | |
| [Vendredi 29 septembre 1944?]
Avec Roland LAMBOLEZ, sur la GNÔME-ET-RHÔNE piquée aux Allemands à HAILLAINVILLE, direction GERBÉVILLER, LUNÉVILLE (arrêt chez les amis HAGEN), NANCY. Nous apprenons que PAGNY-SUR-MOSELLE est libérée depuis le 16 septembre. En route, par LIVERDUN: le pont sur la Moselle entre FROUARD et POMPEY est sauté. Joie de retrouver nos familles après 15 mois de séparation et sans nouvelles. Nous ne restons que 3/4 d'heure à PAGNY pour un arrêt à POMPEY chez les parents de Roland. Pour gagner du temps, je traverse la Moselle entre POMPEY et FROUARD sur la planche qui sert aux piétons. Un peu de repos chez les amis SEITZ à NANCY, mais il faut repartir "avant les aurores". Réservoir à sec. Le seul véhicule que nous trouvons pour y remédier est un … gazogène!!! Il ne nous reste qu'à faire du stop. À 11 heures, nous sommes à HADIGNY. La solidarité est remarquable au peloton. Le seul à ne pas être au courant de notre fugue, c'est le Chef de peloton! À 14 heures, comme si de rien n'était, je pars en patrouille à la Ferme "La Campagne". Rencontre avec des F.F.I., plus sympathiques et efficaces que ceux de REMONCOURT.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 30 septembre 1944 Mar 30 Sep - 13:05 | |
| [Samedi 30 septembre 1944]
Le lendemain, samedi 30 septembre, avec Roland, nous pensons que l'escadron ne peut être engagé un dimanche, et nous reprenons la direction du nord, en stop, cette fois, pour ne pas être retardé par une panne éventuelle. Roland reste à LUNÉVILLE chez les amis HAGEN. Je pousse jusque NANCY: un tour dans la famille de maman à LAXOU, chez le Supérieur du Grand Séminaire, le Père B.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 1er octobre 1944 Mer 1 Oct - 15:10 | |
| [Dimanche 1er octobre 1944]
Le dimanche après-midi, je quitte la famille SEITZ, je récupère Roland et quand nous arrivons, le dimanche 1er octobre, en fin d'après-midi, à HADIGNY, nous découvrons un village "mort". Plus un seul véhicule. Portes et fenêtres fermées. Où est donc passé le 3ème Escadron? Finalement, nous découvrons un paysan qui nous apprend le départ de l'escadron à 8 heures du matin et nous remet l'itinéraire prévu, laissé par un gars du P.H.R. à l'intention des amis absents au moment de la mise en route, car nous n'étions pas les seuls: entre autres, P'tit Louis, Poupon…
Direction XAFFÉVILLERS: une vingtaine de kilomètres seulement, mais… Fort heureusement, une Jeep nous prend en charge. C'est un Capitaine du R.M.T. Nos tenues de sortie, toutes propres et bien repassées, contrastent avec son treillis. Il me semble préférable de lui dire la vérité. J'aimerais retrouver ce Capitaine dont j'ignore le nom. "Si vous étiez de ma Compagnie, je vous fouterais dedans. Mais, comme vous n'êtes pas de chez moi, montez. Pour ne pas avoir d'histoires avec votre Capitaine, je vous lâcherai un peu avant XAFFÉVILLERS." Il nous apprend que ça chauffe dans le coin. Avant de nous larguer, il nous indique le mot de passe. "Merci, mon Capitaine!"
Vers 18 heures, nous sommes enfin dans ce bled. Le plus vite possible, je retrouve René qui pousse un soupir de soulagement: "Va te présenter à LA MOTTE. Il est furieux après toi." Je reçois un bon savon: "J'avais confiance en toi. Tu fais bien ton boulot de conducteur de l'A.M. de pointe. Tu es séminariste et tu trouves le moyen de te barrer! Je ne peux pas te donner de tour de garde supplémentaire avec ta fonction. La taule, tu t'en fous! Comme punition, tu partiras le dernier du peloton en permission." Je comprends l'embarras dans lequel nous avions mis l'aspi, car au départ d'HADIGNY, plusieurs équipages étaient incomplets, dont l'A.M. de pointe et l'obusier. C'est peut-être grâce à quoi le peloton ne fut pas engagé à ANGLEMONT. (Bernard m'a précisé le 2 septembre 1985 qu'il avait refusé cette mission.)
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 2 octobre 1944 Jeu 2 Oct - 15:42 | |
| Lundi 2 octobre 1944
Depuis la veille, le 2ème peloton mène un dur combat à ANGLEMONT. "Bobing" (DESSAUGE) et DRAÏ, enlisés, réussisent à démolir deux chars allemands avec le 37 de leur A.M. Mais il y a 3 tués dont l'Aspirant DELAHAYE, 4 disparus: le Lieutenant GENDRON, blessé, sera fait prisonnier, les 3 autres seront tués dont Maurice GILBERT (MdL Chef), grand ami de René TROËL et plusieurs blessés.
Ordre de départ dans l'après-midi, puis contre ordre. Nous admirons au passage la conscience professionnelle du Trésorier qui nous apporte la solde. Comme 1ère Classe, j'ai droit à 956 Francs.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 3 octobre 1944 Ven 3 Oct - 7:50 | |
| Mardi 3 octobre 1944
L'après-midi, dans un petit village voisin, enterrement des tués de ces deux derniers jours. Avec Rolant, P'tit Louis et je ne sais plus lequel, nous portons le cercueil de l'Aspirant DELAHAYE.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 4 octobre 1944 Sam 4 Oct - 20:17 | |
| Mercredi 4 octobre 1944
Le matin, nous quittons XAFFÉVILLER et par une très mauvaise route, nous retrouvons HAILLAINVILLE, où nous resterons jusqu'au 30 octobre.
Pour le Peloton de LA MOTTE, HAILLAINVILLE, c'est la Mère COSSERAT, c'est la MADO. Il faudrait tout un chapitre pour en relater les aventures. Bien des épisodes seraient classés X.
Un jour, "Frère Roland de la Miséricorde" découvre une quarantaine de bouteilles de mirabelle dans la cave de la Mère COSSERAT. Quand les voisins l'apprennent, leur réponse est encourageante. Elle ne peut pas se plaindre d'avoir été volée, car, chaque hiver, tel Monsieur le Curé pour la collecte du Denier du Clergé, elle faisait sa tournée… pour quémander ce précieux élixir lorrain: "Je n'ai plus de mirabelle pour me faire des grogs." Je ne sais le nombre de grogs qu'elle a pu se faire. Mais ce qui est sûr, c'est que le peloton a gardé son tonus, grâce à la gnôle de la Mère COSSERAT. Il en restait encore pour partir vers BACCARAT.
Les familles sont très sympathiques. Avec P'tit Louis, Poupon VIARD et le "grand DELORME", il nous est même arrivé de donner un coup de main, chez CHANAL et chez PAQUIN, pour les vendanges et pour l'arrachage des pommes de terre. Chaque équipage garde un excellent souvenir de la famille qui nous loge et souvent nous invite à sa table, quand une bonne partie du peloton ne se retrouve pas ches COSSERAT. La "SIMONE" est chez CHANAL, cultivateur, quatre enfants. L'équipage de Jean BEYLER est chez DRAND, en face. Des séances de tir à la 12,7, près de SAINT-BOINGT, améliorent l'ordinaire le jour où des chevreuils s'égarent dans ce qui sert de champ de tir.
Dernière édition par Jean PFLIEGER le Mer 8 Oct - 10:23, édité 1 fois | |
| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 8 septembre 1944? Mer 8 Oct - 10:23 | |
| [Vers le dimanche 8 octobre]
Ce séjour me permet aussi de retourner dans ma famille à PAGNY-SUR-MOSELLE, "presque en règle", avec un ordre de mission signé par le Capitaine LUCIEN pour conduire un petit camion en réparation à NANCY. C'est un renault 2 tonnes récupéré chez les Allemands. Robert DURET, de l'Échelon, est en Jeep. Je le suis péniblement avec un pont arrière qui se dégrade de plus en plus.
À NANCY, le ateliers RENAULT font la semaine anglaise, bon prétexte pour aller à PAGNY, où nous avons failli ne jamais arriver. Il fait nuit. Et Bébert roule tous phares allumé. Ce que n'apprécie pas un poste de M.P. américain peu avant MARBACHE. En nous collant le colt sur la tempe, ils nous demandent nos papiers. L'ordre de mission n'est valable que pour NANCY. Bébert essaye de leur expliquer notre situation et notre intention d'aller chez mes parents. Les Américains sont furieux parce que nous roulons pleins-phares et les Allemands ne sont pas loin de l'autre côté de la Moselle, ce que nous ignorions. Dans mon portefeuille, je trouve ma fiche de vaccination. Cet "Immunization register", formulaire américain, a l'effet d'un sésame. Les deux M.P. se concertent, retirent enfin leur colt, nous laissent repartir, mais en nous suivant avec leur Jeep.
Avec les "yeux de chat" [nom donné aux phares en mode black-out], Bébert ne connaissant pas la route ne va pas vite. Après BELLEVILLE, je prends le volant, et, sans aucun mérite, je peux foncer… et perdre les Américains. À la sortie de PONT-À-MOUSSON, de nouveau arrêtés par un poste de M.P. Nous pensons avoir été signalés par radio. Pas du tout. Les policiers américains nous demandent si nous pouvons conduire un stoppeur à PAGNY-SUR-MOSELLE.
C'est ainsi que nous bénéficions d'une petite détente aux alentours du dimanche 8 octobre.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 9 octobre 1944 Jeu 9 Oct - 5:19 | |
| [Lundi 9 octobre 1944]
Lundi 9, le Renault est réparé et, sous la pluie, nous regagnons HAILLAINVILLE.
Dis-donc, Bernard, je devais partir en permission le dernier du peloton. Qu'en penses-tu?
De temps en temps, les G.M.C. de l'escadron nous conduisent à LUNÉVILLE où nous bénéficions de douches dans des casernes occupées par les Américains. Il nous arrive de revenir avec des treillis en meilleur état que les nôtres, échange standard non prévu au programme.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 15 octobre 1944 Mer 15 Oct - 18:57 | |
| [Dimanche 15 octobre 1944]
Il fait bon à HAILLAINVILLE, mais les occasions ne manquent pas de faire des sorties "extra muros", ce que n'apprécie pas le Colonel REMY qui vient nous faire une petite visite inopinée dans l'après-midi du dimanche 15 octobre: 42 manquants à l'appel de l'escadron.
Pendant ce mois d'octobre, nous avons remis en état nos véhicules. Les effectifs se sont complétés. Pedro BOY nous a rejoints. Depuis l'Angleterre, il avait été détaché à la Circulation Divisionnaire. Blessé à PARIS, il s'est débrouillé pour retrouver le peloton. Hélas! Un manquant, Jacques DEMARLE, vieux compagnon de René depuis toujours et qui est décédé dans un accident le 30 septembre. (NDLR: à Châtel-sur-Moselle le 29 d'après Dominique Forget) Jack STANISLAS, blessé sérieusement, reviendra au peloton en mai 1945.
Dernière édition par Jean PFLIEGER le Jeu 30 Oct - 8:56, édité 1 fois | |
| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 30 octobre 1944 Jeu 30 Oct - 8:57 | |
| Lundi 30 octobre 1944:
Objectif: BACCARAT. C'est les larmes aux yeux que Mr CHANAL nous voit partir à 8 heures du matin. CLÉZENTAINE, DEINVILLERS. Arrêt près d'une petite forêt. La mirabelle de la Mère COSSERAT et celle que nous ont donnée nos hôtes fait des dégâts chez quelques-uns. Nous traversons SAINT-PIERREMONT, MAGNIÈRES, MOYEN, VATHIMÉNIL, la Meurthe à CHENEVIÈRES pour prendre position le soir, dans un petit chemin, à gauche de la R.N. 59, un km avant MÉNIL-FLIN. À quelques mètres, un sherman du 501 est déchenillé sur la voie ferrée.
Il nous semble que toute la Division est rassemblée dans ce petit secteur. Louis BARBESANT, du 12ème Chasseurs, est dans les parages et vient nous voir, Roland et moi. Je retrouve aussi mon cousin René PERRIN dans une scierie toute proche, à droite, de l'autre côté de la nationale. Il est sur un tas de foin, essayant de se débarasser d'une crise de palu. René avait été porté disparu lors des combats sur la Loire en juin 1940. En fait, il avait pu s'évader de France pour continuer et faire toutes les campagnes de la France Libre avec le 501 depuis la Syrie. C'est à PAGNY que j'avais appris qu'il était, lui aussi, à la 2ème D.B. "avec un béret noir". Nous avions eu l'occasion de nous revoir… sans nous reconnaître. Je pensais qu'il avait eu le même sort que son oncle (René PERRIN, lui aussi) disparu à CHAMPENOUX au début de la guerre 14-18 et qui n'est jamais revenu. "Bouboule" a eu plus de chance.
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| Sujet: Re: Spahi Roger MARION (3/3/1er RMSM) Ven 31 Oct - 8:14 | |
| Mardi 31 octobre 1944Le peloton est détaché au sous-groupement CANTAREL. À 6 heures, nous partons vers MÉNIL-FLIN, la "Simone" en pointe. Dès l'entrée à MÉNIL-FLIN, nous prenons la première route à gauche qui mène à OGÉVILLER. Stop dans la forêt [de Mondon]. À 8h30, violent tir de l'artillerie américaine. Ça passe au-dessus de nos têtes. Nous ne risquons rien. © Franck BATTIATA Nous nous remettons en route pour emprunter une méchante piste boueuse sur notre droite, en direction d'HABLAINVILLE (à ne pas confondre avec HAILLAINVILLE). Sortis de la forêt, des chars du 501 sont sur notre gauche, à travers champs. À force de patauger dans la boue, nos A.M. s'enlisent. Grâce aux chaînes que j'avais soigneusement conservées, je peux me remettre sur la piste et aider les autres A.M.. Un camion du 501 nous apporte le ravitaillement en essence. Peu de temps après, Edith SCHALLER arrive avec son ambulance [NDLR: Gargamelle] conduite par Lucie DESPLANQUES (DEPLANCKE? Décédée le 3 août 1985 au Val de Grâce). Edith descend et demande à Bernard de LA MOTTE où sont les blessés. Sans doute il y en a dans un Sherman un peu plus loin sur notre gauche. L'ambulance doit faire demi-tour. Un gars du camion du 501 la guide pour cette manœuvre. Nous sommes à côté, sur le bord de ce qui sert de chemin: Edith et Bernard, Guy et moi, à quelques mètres de l'ambulance. Une explosion projette l'ambulance en l'air. L'ambulance retombe, couchée sur le côté chauffeur. Nous réalisons que Lucie est passée sur une mine que n'importe lequel d'entre nous aurait pu se payer. Je grimpe sur l'ambulance dont l'arrière est défoncé. Par la portière droite, j'extirpe Lucie du fond de sa cabine. Je la place sur le talus. Elle est pâle: on le serait à moins. Du sang lui coule sur le visage. Elle reprend vite ses esprits et voit son ambulance éventrée: "Ma pauvre bagnole! Je vais me faire engueuler par Toto". "Étant aux premières loges, je peux apporter des précisions à cet épisode que Madame MASSU [NDLR: Suzanne TORRÈS ou "Toto"] relate dans son ouvrage "Quand j'étais Rochambelle" page 205. Le moment de stupeur étant passé, nous nous rendons compte que le gars du 501 a disparu. Il a été projeté, un peu plus loin, la poitrine défoncée. Je ne connaissais pas son nom. Ce doit être le Caporal Louis FLEURET qui figure à la date du 31/10/1944 dans le "Document à la mémoire des Combattants de la 2ème D.B. tombés au Champ d'Honneur dans les combats de la Libération de STRASBOURG" édité par l'Association des Anciens de la 2ème D.B. du Bas-Rhin pour le 25ème anniversaire de la Libération de STRASBOURG. Dans l'après-midi, nous descendons sur HABLAINVILLE. Nous traversons BROUVILLE, croyant y être les premiers. Mais les fusiliers-marins y étaient passés plus tôt par un autre axe. D'après le document cité plus haut, le Lieutenant Henri de GAVARDIE a été tué à BROUVILLE ce 31 octobre, avant ou après notre passage? De BROUVILLE à MERVILLER, un Messerschmidt vient sur nous, à basse altitude et nous mitraille copieusement. Pas de casse. Mais nous avons eu chaud! À MERVILLER, direction MONTIGNY, à gauche. Nous tournons le dos à BACCARAT libéré par d'autres éléments de la Division. Peu avant MONTIGNY, la route monte légérement. J'arrête "à défilement de tourelle". Devant nous, à gauche de la route, un char allemand. Il nous rate. P'tit Louis lui rend la politesse et nous recevons l'ordre de rejoindre le peloton qui s'installe dans un bosquet plutôt marécageux, pas très loin de la D935, au carrefour de REHERREY. Au cours de la nuit, la garde est prise sérieusement.
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| Sujet: Re: Spahi Roger MARION (3/3/1er RMSM) Ven 31 Oct - 13:02 | |
| BROUVILLE Note: Une photo publiée dans le livre de Dominique FORGET "Le Général Leclerc et la 2ème DB" page 259 est commentée sur le site "Matériels Terrestres 39/45" avec une vue actuelle du même endroit.
On y voit des AM de Spahis à Brouville.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 1er novembre 1944 Sam 1 Nov - 14:26 | |
| Mercredi 1er novembre 1944
La matinée se passe à creuser des trous pour nous protéger de l'artillerie allemande qui n'arrête pas de tirer. Nous ne sommes qu'à quelques kilomètres de la VorVogesenstellung.
Dans l'après-midi, direction MONTIGNY. Avant l'entrée du village, à droite, le char d'hier est toujours là, mais hors d'usage. J'en aurai l'explication deux ans plus tard par un prisonnier allemand affecté à la ferme en face de chez mes parents. Joachim est à peu près de mon âge. Il est excellent mécanicien et parle couramment français et anglais. Je le rencontrais pendant mes vacances. Inévitablement, nous en sommes venus à "parler de nos campagnes". Joachim se trouvait à MONTIGNY le 31 octobre 1944. Ne pouvant réparer ce char, l'ordre a été donné de le rendre inutilisable, et de se replier. Le 1er novembre, Joachim et ses camarades n'étaient plus à MONTIGNY. Ils furent faits prisonniers beaucoup plus tard.
Le peloton a pour mission de protéger le déminage par le Génie du pont en direction de DOMÈVRE. Nous arrêtons nos véhicules après le carrefour, prêts à foncer. Tout à coup, violent tir de l'artillerie allemande. Bernard, René, P'tit Louis et d'autres plongent dans le fossé… rempli d'eau. Un obus démolit la Jeep, conduite ce jour par Georges CAËR. Trois autres tirs d'artillerie suivent. Pas un blessé au peloton, mais sapeurs, fusiliers-marins et chasseurs du 501 ont des pertes.
Nous revenons au carrefour de REHERREY (dégagé par CANTAREL). L'artillerie allemande ne désarme pas.
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| Sujet: 2 novembre 1944 Dim 2 Nov - 8:01 | |
| Jeudi 2 novembre 1944
Il pleut toujours… de la pluie… et des obus. Nous pataugeons dans la boue. Les guitounes sont trempées. Ce n'est pas grave. En face de nous, à VACQUEVILLE, le peloton VEZY subit de sérieux accrochages: DUVAL et le grand REB sont tués, LAURENT et de GALEA blessés.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 3 novembre 1944 Lun 3 Nov - 7:49 | |
| Vendredi 3 novembre 1944
Le soleil se montre un peu. Nous coupons des arbres pour améliorer ce coin où nous nous embourbons.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 4 novembre 1944 Mar 4 Nov - 8:17 | |
| N'OUBLIEZ-PAS DE SUIVRE LE PARCOURS SUR LA CARTE !
Samedi 4 novembre 1944
Relevés par des Américains, nous rejoignons le cantonnement du G.T.V. à BROUVILLE. Il nous faut extirper nos bahuts de la boue dans laquelle plusieurs se sont enlisés.
BROUVILLE. Plusieurs jours avant l'attaque de BACCARAT, les habitants avaient été évacués par les Allemands à BERTRAMBOIS. Le 31 octobre, dix d'entre eux étaient revenus rechercher quelques affaires. C'est ainsi qu'ils étaient là au moment de la libération de leur village et y restèrent.
Quarante ans plus tard, il reste encore quatre survivants, dont trois à BROUVILLE: Mr Henri HOUILLON, 76 ans, Mlle Jeanne POIROT, secrétaire de Mairie et Mr André CLAUDON, dont le père, conseiller municipal en 1944, était aussi parmi les dix, et faisait fonction de Maire auprès des autorités militaires.
Différentes unités du G.T.V. occupent toutes ces maisons vides, les civils s'étant regroupés. La "Simone" s'installe chez Mme HOVASSE (du courrier disséminé un peu partout nous indique: Mme HOVASSE, coquetière, à BROUVILLE par BACCARAT).
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 5 novembre 1944 Mer 5 Nov - 11:07 | |
| Dimanche 5 novembre 1944
À l'appel de 17h00, le Capitaine LUCIEN, muté au G.T.L., fait ses adieux à l'Escadron.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: 8 novembre 1944 Sam 8 Nov - 8:00 | |
| [Mercredi 8 novembre 1944]
Le nouveau Capitaine DA "préside" le rassemblement du mercredi 8 novembre.
Le temps passe à nettoyer armes et véhicules, à remettre en état, à monter la garde, sans trop nous fatiguer la nuit, car chaque unité a sa garde, et comme nous sommes à peu près eu milieu du village, les copains nous protègent d'incursions ennemies toujours possibles. Les rations américaines sont complétées par des produits locaux: si nous calons sur une vache imprégnée de mazout, nous déclarons excellente une volaille apprêtée par P'tit LOUIS, bien que calcinée "en surface" et saignante au dedans. Le lait ne manque pas (même les spahis ne dédaignent pas ce breuvage): j'ai retrouvé un ancien condisciple du séminaire, dans une ferme perdue à l'orée d'un bois en direction de MERVILLER. Camille DELON m'apprend qu'un de nos aînés, René ARNOULD, jeune prêtre, a été fusillé, dans les environs, le 1er septembre, d'une rafale de mitrailleuse par les Allemands et qu'il y a eu un sérieux massacre, trois jours plus tard à VIOMBOIS. Camille me prête un de ces grands bidons de ferme que je viens remplir chaque jour, avec Zezette BOISDRON ou Jo RENUCCI. Le crabotage est bien utile sur cette piste boueuse. Il arrive que le bidon n'est pas assez grand pour les parties de cartes qui se prolongent tard dans la nuit. Même notre breton René apprécie le lait lorrain.
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| | | Jean PFLIEGER Rang: Administrateur
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| Sujet: Re: Spahi Roger MARION (3/3/1er RMSM) Dim 9 Nov - 9:45 | |
| Il y a aussi des divertissements pittoresques: Un après-midi, on vient me chercher: "Toi, qui es "apprenti-curé", viens voir la procession." En effet, un cortège est sorti de l'église: quelques gars des autres pelotons de l'escadron, dont le célèbre BOBING, revêtus de tout ce qu'ils avaient pu trouver à la sacristie, et braillant des cantiques qu'on ne trouve pas dans les livres liturgiques. Ce n'est pas du tout par dérision, mais tout simplement une joie causée par l'abus de la dive bouteille. Il est cependant préférable d'y mettre fin, sans rien brusquer et avec des arguments qui risquent de porter: "Ne faites pas les idiots: si après la guerre, je suis nommé curé de ce bled (Brouville est du diocèse de NANCY dont je fais partie), je n'aurai plus de paquetage pour faire mon travail." Et je prends la tête du cortège en entonnant la version du "De profundis" mieux connue des spahis que celle du roi David. À l'entrée de l'église, je fais déposer les ornements dans des "charpagnes" (appellation lorraine de grands paniers en osier) qui se trouvaient là par hasard. Chacun regagne son peloton. En rangeant les ornements à la sacristie, je découvre que les vases sacrés (calice, ciboire, ostensoir) sont ici, à l'abandon. Je vais les mettre en sécurité chez Mr CLAUDON, faisant fonction de Maire. Il se trouve que Mr CLAUDON avait eu l'occasion de rencontrer mon père lors de réunions à NANCY pour des questions artisanales. Malgré le mauvais temps, le séjour à BROUVILLE se passerait bien si les Allemands ne nous bombardaient pas plusieurs fois par jour. Leurs batteries se trouvent sur les hauteurs derrière SAINTE-PÔLE et SAINT-MAURICE, où passe la fameuse Vorvogesenlinie. Et le clocher de BROUVILLE est bien pratique pour eux.
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