- jean-yann a écrit:
- moi non plus je ne suis pas spécialiste, j'ai juste regardé un peu sur le web après avoir lu cet article dans OF.
espérons que des membres auront plus d'info !
Bonjour à tous,
Concernant cette voiture, voici ce que j'en sais actuellement
Commandée le 4 avril 1941, cette 770k carrosserie n° 200787, série 150 0061 0005 ne fût livrée que le 2 février 1943 à Munich. On peut légitimement penser qu'elle était dévolue au service du Berghof à l'occasion de visites de personnalités ou pour quelques déplacements du Führer, plus à l'abri dans une voiture fermée en ces temps de plus en plus incertains pour lui.
On la voit par exemple à Salzbourg, au palais Klessheim, le 15 mars 1944, lors de la rencontre d'Hitler et de l'Amiral Horthy lors des discussions sur l'occupation de la Hongrie
Comme bon nombre des voitures du "Führer Complex" de Berstechgaden, la limousine se transforma en prise de guerre!
Il y a quelques années, aux Archives départementales de l'Orne, fût retrouvée une photo légendée "Mercedes d'Hitler, ramenée d'Allemagne par François Levesque, Mortagne-au-Perche, 1945." Sur le cliché, une grosse Mercedes, deux hommes penchés sur le moteur, et un soldat en uniforme américain. Cette découverte suscita la curiosité d'un journaliste du quotidien Ouest-France; Qui était ce François Levesque ? Qu'elle était son histoire et celle de la Mercedes ?
C'est ainsi que l'on apprit que François Levesque, décédé en 2011, s'engagé dans la 2e DB en août 44 à l’âge de 20 ans, quand l'unité du général Leclerc passe à Mortagne au Perche et fait ensuite toute la campagne d'Allemagne jusqu'à arriver à Berchtesgaden fin avril 1945.
Lorsque la voiture de son lieutenant tombe en panne, le jeune sergent se met en devoir de lui en trouver une autre. Il s'adresse à un prisonnier allemand, lui demandant où trouver un garage. Ce dernier tente bien de « jouer » les deux Français en les conduisant d'abord dans un garage vide, mais devant le ton décidé des deux soldats prêts à en découdre, l'allemand finit par les conduire à quelques kilomètres de là, en forêt, où se trouvaient des garages camouflés. A l'intérieur une bonne dizaine de Mercédès dont la Pullman Limousine sur laquelle ils jettent leur dévolu.
Mais la belle ne veut pas démarrer, pas plus que les autres d'ailleurs. Sans doute, une ultime manoeuvre des allemands pour éviter que ces voitures puissent servir aux troupes alliées. Mais au sein de la deuxième D.B. il ya des mécanos et ils sauront rapidement réveiller la belle endormie.
On exhibe la prise de guerre. Sur son passage, quelques allemands s'écrient "Hitler wagen" ! », l'auto d'Hitler ! En apprenant la valeur de leur prise, François Levesque et son lieutenant emmènent le véhicule au Général Leclerc.
Mais celui-ci refusa le cadeau et le 8 mai 1945, il rédigea un ordre de mission peu ordinaire: "Conduire la voiture Mercedes Benz Z 96-501 au Général de Gaulle, laquelle est offerte par le général Leclerc. C'est avec le général de Boissieu à son bord, que la limousine prend la route pour Paris (cf. Pour combattre avec de Gaulle par Alain de Boissieu).
Elle fût donc ramenée à Paris, comme en témoigne Jeanne, sœur du jeune soldat, qui a conservé une photo montrant son frère au Trocadero avec la grosse berline. « Après une étape dans un garage, pour la laver et la remettre en état, mon frère nous a emmenés faire un tour dedans avec mes parents » précisait elle au quotidien Ouest-France en 2014.
Présentée au général de Gaulle celui-ci ne souhaita pas la garder, la 770k fût confiée au Musée de l’Armée.
L'arrivée de la voiture ne passa pas inaperçue. Le journal "Le Monde" dans son édition du 1er décembre 1945 annonça l'évènement en ces termes : "Le 1er décembre, à 14 h. 30, dans les magasins des automobiles Renault, 51, avenue des Champs-Élysées, sera ouverte au public et jusqu'au 1er janvier (NDLR :1946) l'exposition de la voiture blindée de Hitler, capturée à Berchtesgaden le 7 mai 1945, offerte par le général Leclerc au général le Gaulle , qui l'a prêtée à " Victoire ", organisme national de solidarité combattante, 22, avenue Foch. Prix d'entrée : 10 fr. ; 5 fr. pour enfants et militaires en tenue.
Le bénéfice des entrées sera affecté aux œuvres de " Victoire ", qui vient en aide chaque jour aux victimes de la guerre"
Des éléments de la voiture sont conservés au Musée du général Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris - Musée Jean Moulin:
Dans les quatre années qui suivirent, "Victoire" loua la voiture pour de nombreuses manifestations tant en France, qu'aux quatre coins de l'Europe. aux USA et au Canada, et parfois aux prix de quelques difficultés...
En effet, "Le Monde" du 10 février 1949, titrait : "On a retrouvé la voiture de Hitler". La lecture de l'article est particulièrement savoureuse : "Une dépêche de Syracuse nous apprend que la voiture blindée de Hitler - la fameuse " limousine noire " à l'abri des balles, - que l'on considérait comme disparue, vient être retrouvée dans un garage de cette ville. On rappelle à ce propos que ladite voiture, dont un groupe de soldats américains s'était emparé à Berchtesgaden, avait été offerte au général de Gaulle qui à son tour en fit cadeau à une organisation s'occupant d'orphelins de guerre français. Celle-ci l'avait louée successivement à des Anglais puis à des Américains, et ce sont ces derniers qui, ayant égaré la fiche du garage, ne savaient plus où ils l'avaient remisée..
On la voit ici à son arrivée dans le port de New York, le 23 juillet 1947
Un télex avait annonçé son départ du Port du Havre(ci-dessous)
En 1949, le Musée de l'Armée s'en sépara, et elle fût acquise par un américain qui s'en servit pour des exhibitions au travers des Etats-Unis comme la Virginia State Fair ou la campagne électorale du Sénateur Georges Wallace, candidat à la présidence.
En 1986, elle était dans les mains d’un collectionneur américain de Philadelphie.
On sait qu'elle n'a subi aucune restauration et que son intérieur est défraichi. Mais aussi qu'elle n'aurait accompli que 9000 miles depuis sa mise en service...Malheureusement, elle aurait perdu ses anti brouillards, son phare Notek, quelques accessoires et sa radio. De même, elle aurait un impact de balle dans la lunette arrière, suite à une exhibition.
Reste le mystère de cette plaque d'immatriculation : Z 96 501. Ce qui est certain, c'est qu'il ne s'agit pas d'une immatriculation allemande. Néanmoins, la photo du site de l'Agence d'images de la défense, datée du 5 mai 1945 et prise à Berstechgaden par Philippe Héritier pourrait laisser penser que l'immatriculation d'origine pourrait être IA-148696. Auquel cas, et les Deutsche Wochenschau nous le démontrent, la Z 96 501 a bien servi à la Chancellerie du Reich.
Quoi qu'il en soit, la voiture n'a pas réapparu depuis près de trente ans...